Après ses critiques
récurrentes contre la formation des enseignants, le ministre passe à l’action
avec une réforme qui prévoit le démantèlement des IUFM dans leur forme actuelle.
Encore une fois, il s’agit de casser plutôt que d’améliorer.
Aujourd’hui
l’École est au cœur des problèmes de la société. Les attentes la concernant
n’ont jamais été aussi diverses : accès de tous à des savoirs sans cesse
renouvelés, prise en compte de publics scolaires très hétérogènes, exigence de
qualification pour tous, éducation à la vie en société... chaque enseignant en
fait le constat : le métier évolue, se complexifie et son exercice
quotidien se révèle plus difficile. La prise en compte de l’évolution du métier
enseignant doit se traduire notamment par une réforme de la formation des
maîtres.
Après des mois ponctués de rumeurs et de propos négatifs à l’égard des IUFM,
Luc Ferry a présenté ses orientations concernant la réforme de la formation des
maîtres au conseil des ministres du 9 avril. Une fois de plus, le ministre a
esquivé les débats de fond avec les organisations syndicales, ne concevant la
« concerta-tion » que comme un accompagnement technique des décisions
prises.
Les mesures envisagées par Luc Ferry sont affligeantes. Elles procèdent d’une
vision du métier d’enseignant se réduisant à la seule maîtrise disciplinaire et
à l’application scrupuleuse des programmes. Pour mettre en œuvre cette
conception rétrograde du métier d’enseignant, Luc Ferry propose plusieurs
mesures :
centrer les contenus des concours
et de la formation initiale sur les programmes scolaires ;
allonger les périodes de stages
en 2e année d’IUFM ;
transférer une partie de la
formation aux écoles et établissements ;
réduire la formation continue à
l’actualisation des connaissances disciplinaires.
Économiser,
mettre au pas
À
l’approche de fortes tensions dans le domaine du recrutement, il faut
comprendre la volonté d’allonger la durée des périodes de stages comme une
mesure dictée uniquement par le souci d’économiser des moyens au détriment de
la formation.
Sous prétexte de vouloir resserrer les liens entre les universités, les
rectorats et les IUFM, ces derniers en ressortiront ligotés et baillonnés. La
création des IUFM, il y a 12 ans, avait suscité de fortes oppositions qui n’ont
jamais désarmé.
C’est une conception réactionnaire de l’école et du métier d’enseignant qui est
en filigrane . Dans les projets ministériels, il n’est fait aucune référence
explicite ni aux valeurs fondatrices de l’École, ni à une conception du métier
d’enseignant prenant en compte les évolutions actuelles. C’est bien la loi
d’orientation de 1989 qui constitue le « cœur de cible » des projets
de Luc Ferry.
Les IUFM ont pour ambition de former dans un même lieu les futurs enseignants
des écoles, des collèges, des lycées et lycées professionnels, les futurs
personnels d’éducation. Ce lieu unique est un établissement universitaire
articulant formation théorique et pratique. En perspective se dessinait un
projet d’évolution du métier d’enseignant centré sur son unité, tout en prenant
en compte les spécificités d’exercice.
Certes, les IUFM n’ont pas encore atteint ces objectifs et sont l’objet de
critiques qui ont déjà été prises en compte dans bon nombre de projets
d’établissements. Mais ce constat conduit le Sgen-CFDT à exiger une véritable
formation d’adultes professionnelle, en alternance et universitaire. C’est
d’une réforme de la formation et non d’une contre réforme que l’École a besoin.
Marc
Douaire